15 décembre 2022
Alors que 2022 touche à sa fin, les besoins de santé fondamentaux de milliards de personnes, adultes comme enfants, ne sont toujours pas satisfaits. La moitié de la population des pays à revenus faible et intermédiaire n’a pas accès aux traitements les plus efficaces et les plus récents, parce qu’ils ne sont pas disponibles ou parce que leur prix est trop élevé. Il en résulte fatalement des taux de morbidité et de mortalité bien trop importants, ou des traitements au coût si élevé que les conséquences sont accablantes, voire catastrophiques.
Notre objectif, au Medicines Patent Pool, est d’agir pour mettre fin à ce manque d’équité. C’est dans cet objectif que nous nous sommes développés ces dernières années. L’année 2022 n’a pas fait exception, avec l’élargissement de nos activités pour englober les petites molécules dans le domaine des maladies infectieuses, les maladies non transmissibles, les vaccins et d’autres technologies de santé. Nous avons aussi pris appui sur cet objectif pour élaborer une nouvelle stratégie pour 2023-2025.
Cette stratégie couvre une période inhabituellement courte, et reflète la nécessité de consolider l’élargissement récent de nos activités. Cependant, il s’agit également d’une stratégie de transition, qui vise à ce que l’organisation serve au mieux la santé publique dans un environnement qui évolue très vite. La nouvelle stratégie, dont le lancement est prévu le 30 janvier 2023, s’appuie sur cinq objectifs qui consolident notre travail ou qui en sont le prolongement, en adoptant cependant une démarche plus systématique :
En juillet 2022, parallèlement à notre action visant à favoriser la continuité de l’adoption des médicaments contre le VIH et l’hépatite C pour lesquels nous avons déjà obtenu des licences, nous avons conclu un accord de licence avec ViiV Healthcare sur le cabotégravir à action prolongée à prendre dans le cadre de la prophylaxie préexposition (PrEP) contre le VIH. Chaque année, on dénombre environ 1,5 million de nouveaux cas de VIH dans le monde ; la plupart surviennent dans des pays aux ressources limitées, et les femmes et les adolescentes sont les plus touchées, de manière disproportionnée. Il existe différents traitements oraux pour la PrEP disponibles dans de nombreux pays. Cependant, la difficile observance du traitement et la stigmatisation de la maladie limitent les retombées de la PrEP sur certaines populations. Par conséquent, la possibilité d’accéder à un traitement à action prolongée efficace pour la prévention du VIH pourrait grandement contribuer à éradiquer l’épidémie de VIH.
Dans un domaine autre que celui des maladies infectieuses, qui compte souvent de nombreux obstacles à l’accès, nous avons intégré le regroupement ATOM (Access To Oncology Medicines, pour l’accès aux médicaments contre le cancer), qui a été officiellement établi pendant l’Assemblée mondiale de la Santé de cette année. Dirigé par l’UICC (Union internationale contre le cancer), ATOM prend appui sur la diversité de ses membres pour s’attaquer aux problèmes de l’insuffisance du dépistage, de l’absence de formation des praticiens de santé, de la faiblesse de l’infrastructure et de l’inertie des gouvernements. Grâce à son action, Novartis a estimé qu’une licence volontaire pourrait avoir un réel impact dans les pays où ATOM mènera ses activités, et nous a donc octroyé une licence sur le nilotinib, un médicament contre la leucémie myéloïde chronique qui figure sur la Liste des médicaments essentiels de l’OMS, pour les adultes et les enfants.
Cette année, notre travail dans le domaine des nouvelles technologies s’est concentré sur les technologies à action prolongée et les vaccins à ARNm. Au mois de septembre,nous avons signé un accord de licence avec l’entreprise française MedinCell pour sa technologie à action prolongée innovante. Celle-ci sera utilisée pour mettre au point une formulation injectable d’ivermectin efficace pendant trois mois, afin de réduire la transmission de la maladie pendant son pic saisonnier. Le paludisme reste un problème majeur, avec plus de 600 000 décès en 2020, dont 95 % surviennent dans la région Afrique de l’OMS, principalement en Afrique subsaharienne, et touchent 80 % d’enfants âgés de moins de cinq ans. En décembre, le Lancet Global Health a publié notre article sur l’amélioration de l’accès aux produits biothérapeutiques dans les pays à revenus faible et intermédiaire grâce à l’octroi de licences volontaires non exclusives axées sur la santé publique. Cet article fait le point sur la situation et formule des recommandations visant à analyser les besoins et à saisir les opportunités. C’est un point de départ ambitieux que nous avons hâte de concrétiser.
Nous avons continué de codiriger avec l’OMS le Programme de transfert de la technologie à ARNm, en apportant un appui à Afrigen (Afrique du Sud) pour mettre au point et transférer une technologie à ARNm en vue de la production de vaccins. Aujourd’hui, le Programme, basé sur un système de donneur-receveurs, compte des receveurs de technologie dans 15 pays, la candidature d’autres entités étant actuellement à l’étude. Aujourd’hui, nous jouons au sein de ce Programme un rôle plus important que ce qui était prévu initialement. Outre la gestion des accords et, dans le futur, des licences qui en découleront, nous sommes chargés de la mobilisation des ressources, notamment au travers de réunions régulières avec les bailleurs de fonds ; de la communication ; et de l’organisation de rencontres régulières avec les acteurs de la société civile. Afin de renforcer l’appui que nous apportons à Afrigen dans le cadre de son développement actuel et du futur transfert de technologie, nous avons recruté en janvier une équipe spécialiste du transfert de technologie au sein du MPP. Cette équipe, responsable de l’appui au Programme, secondera également le transfert de technologie une fois que des licences auront été obtenues sur des médicaments plus complexes, notamment des produits biologiques.
15 receveurs sélectionnés pour être les destinataires de la technologie transférée par le Centre de transfert
En mai dernier, dans le cadre de notre travail de préparation et de riposte aux pandémies, le MPP a signé deux licences avec les Instituts nationaux de la santé des États-Unis sous les auspices de C-TAP, le groupement d’accès aux technologies contre la COVID-19 de l’OMS, pour 11 technologies dans les domaines du traitement, du dépistage et de la vaccination. Au mois d’octobre, ces accords ont remporté la récompense « Deal of Distinction award », remise par la Licensing Executives Society, dans la catégorie Partenariats Industrie-Universités-Gouvernement.
Steven Ferguson, Conseiller spécial du Bureau du transfert de technologie des Instituts nationaux de la santé, et Sandra Nobre, Responsable du développement de l’activité du MPP, ont reçu cette récompense décernée à San Francisco en octobre 2022.
Toujours en octobre, nous avons signé un accord de licence avec Shionogi pour son nouvel antiviral contre la COVID-19. Il s’agit du premier accord de licence conclu avec une entreprise japonaise. Afin de réduire le délai qui sépare la commercialisation des produits dans les pays à revenu élevé et la mise sur le marché dans les pays à revenus faible et intermédiaire, nous avons signé l’accord de licence avant même que le médicament ait reçu l’approbation des autorités de réglementation.
L’un des principaux enseignements tirés de la COVID-19 a été la nécessité d’améliorer l’équité de l’accès en veillant à la mise en place de capacités de production pérennes et géographiquement diversifiées. Sur nos encouragements, plusieurs fabricants basés dans des pays à revenus faible et intermédiaire ont déposé des demandes de sous-licences pour le molnupiravir de MSD et le nirmatrelvir de Pfizer, lesquelles ont abouti à la délivrance de respectivement 27 et 35 sous-licences. Ainsi, si avant la pandémie, les titulaires de nos sous-licences étaient implantés dans seulement six pays, majoritairement en Inde et en Chine,ils sont aujourd’hui basés dans 16 pays à revenus faible et intermédiaire.
Comme vous avez pu vous en rendre compte, l’année 2022 a été une année riche en activités, et a comporté son lot de réussites. Nous n’aurions pas pu franchir toutes ces étapes sans la générosité de nos bailleurs de fonds – Unitaid et les gouvernements d’Allemagne, de France, du Japon et de la Suisse.
Je voudrais aussi remercier les membres des équipes du Medicines Patent Pool à Genève et à Mumbai, qui n’ont pas ménagé leurs efforts cette année. Merci également à tous les membres de notre Conseil de fondation, notre Groupe consultatif d’experts, notre Groupe consultatif technique et notre Comité consultatif scientifique indépendant sur l’ARNm, qui ont gracieusement mis leur temps à notre disposition. Notre succès repose sur votre investissement.
Nous avons avancé sur le chemin de l’accès équitable, mais nous savons qu’il nous reste encore un long chemin à parcourir.
Département communication, presse et médias
Le Medicines Patent Pool (MPP) est une organisation de santé publique soutenue par les Nations Unies, dont la mission est d’améliorer l’accès à des médicaments essentiels dans les pays à revenu faible et intermédiaire, et de faciliter la mise au point de tels médicaments. Au travers de son modèle économique innovant, le MPP collabore avec la société civile, les gouvernements, des organisations internationales, l’industrie, des groupes de patients et d’autres acteurs afin d’établir des priorités, de délivrer des licences sur les médicaments indispensables et de centraliser les actifs de propriété intellectuelle pour faciliter la fabrication de médicaments génériques et l’élaboration de nouvelles formulations.
À ce jour, le MPP a signé des accords avec 22 titulaires de brevets pour 13 antirétroviraux contre le VIH, une plateforme technologique sur le VIH, trois antiviraux à action directe contre l’hépatite C, un traitement contre la tuberculose, un traitement contre le cancer, quatre technologies à action prolongée, un traitement de l’hémorragie du post-partum, trois traitements antiviraux oraux contre la COVID-19 et 16 technologies liées à la COVID-19.
MPP a été fondé par Unitaid, qui continue d’être le principal bailleur de fonds de MPP. Le travail de MPP sur l’accès aux médicaments essentiels est également financé par l’Agence suisse pour le développement et la coopération (SDC), le gouvernement du Canada, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et le gouvernement de la Flandre. Les activités de MPP dans le cadre de la COVID-19 sont entreprises avec le soutien financier du gouvernement japonais, du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, de l’Agence allemande de coopération internationale et de la SDC.