Améliorer les traitements contre le VIH pédiatrique : l’histoire de Jerop
19 novembre 2020
vivant avec le VIH
– Par Jerop Limo, du programme AYARHEP (Ambassador for Youth and Adolescent Reproductive Health Programme)
Si aujourd’hui je suis ambassadrice pour la jeunesse et si je travaille aux côtés d’autres jeunes, pour les aider à faire face au VIH et au traitement, c’est à cause de ce que j’ai traversé. Ce n’est pas parce que mon histoire est exemplaire, mais au contraire parce que je suis tombée dans tous les pièges. Chaque étape a été une épreuve que j’ai affrontée seule : l’annonce, le traitement, la stigmatisation… Aujourd’hui, je veux agir pour que les jeunes n’aient plus à affronter seuls ces épreuves. En leur offrant du soutien et de la compassion, en les guidant et en leur apportant mon expérience.
On m’a diagnostiquée séropositive à 13 ans, mais on ne m’a pas dit ce que j’avais.
J’ai perdu ma maman quand j’avais 9 ans. J’étais tout le temps malade, en sous-poids, et j’avais des plaies sur tout le corps. Et puis j’ai attrapé la tuberculose et une pneumonie. Mon père et mon médecin ont alors décidé de me faire passer des examens pour comprendre ce qui se passait. On m’a diagnostiquée porteuse du VIH quand j’avais 13 ans, mais personne ne m’a dit ce que j’avais. Je ne comprenais pas pourquoi je prenais des médicaments, et j’ignorais que j’allais devoir en prendre jusqu’à la fin de ma vie. Ni le médecin ni mon père ne m’a expliqué qu’il était très important que je prenne mes antirétroviraux tous les jours à heure fixe. Lorsque mon père n’était pas là pour s’assurer que je respecte mon traitement, je ne le prenais pas ou je le cachais.
J’étais bonne élève à l’école et on m’a proposé d’aller dans un internat. Mon père, qui a pensé que je ne serais pas capable de prendre correctement mon traitement toute seule, a voulu me protéger. Il a ainsi préféré m’inscrire dans un externat. À l’internat, on n’a pas d’intimité et il est plus facile de ne pas prendre son traitement pour éviter que les autres enfants ne vous stigmatisent. Il était donc préférable que mes médicaments restent à la maison pour me permettre de mieux respecter mon traitement.
En tant qu’adolescente vivant avec le VIH, on se pose beaucoup de questions.
C’est à 15 ans que j’ai découvert que j’étais séropositive, en entendant par hasard une conversation entre mon père et le médecin. J’ai mis beaucoup de temps à l’accepter. J’ai vécu les pires années de ma vie. Comme beaucoup de jeunes gens, de nombreuses questions me tourmentaient, en plus de la maladie. Maintenant que je suis plus âgée, je comprends mieux ce que mon père et moi avons traversé. Bien comprendre l’enjeu du traitement est très important pour tout parent d’un enfant porteur du VIH. Si mon père avait été mieux informé, je n’aurais pas appris par hasard ma séropositivité et je n’aurais pas eu à en découvrir les conséquences seule. Les parents doivent être épaulés et guidés pour surmonter chaque étape avec leur enfant : l’annonce du diagnostic, le traitement, la lutte contre la stigmatisation et la discrimination, l’adolescence et toutes ces émotions que les jeunes gens ressentent.
Les adolescents vivant avec le VIH sont confrontés à la stigmatisation et à la discrimination à l’école. Mais aussi au rejet de la part de ceux qu’ils aiment, qu’il s’agisse de petits-amis ou de petites-amies et parfois de sa propre famille et de sa communauté. Il y a des jours où on voudrait que tout s’arrête. C’est pourquoi avoir un « parrain de traitement » et le soutien de sa famille sont si importants. Un jeune a besoin de quelqu’un pour écouter ses craintes, répondre à ses questions, lui expliquer l’importance du traitement et l’aider à le respecter.
Il faut que les traitements anti-VIH soient adaptés aux enfants.
J’espère que, bientôt, de meilleurs traitements pédiatriques seront disponibles. Parce que la complexité du protocole thérapeutique fait peser un poids psychologique supplémentaire sur les jeunes. Je me souviens que, lorsque j’étais enfant, je devais prendre mes médicaments deux fois par jour, à 6 heures et à 18 heures piles. Leur goût était horrible et il y avait beaucoup d’effets secondaires. Je ne pouvais pas les prendre à jeun et je devais me reposer pour réduire leurs effets secondaires. Le traitement pesait énormément sur ma vie de tous les jours et je trouvais ça très injuste. Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Je sais que d’autres jeunes ressentent la même chose et je suis là pour les aider.
Il faut que les médicaments soient adaptés aux enfants. Qu’ils ne soient pas amers, qu’ils soient faciles à prendre, faciles à se procurer, sans ruptures de stock, pour que le traitement passe presque inaperçu. Alors, il sera beaucoup plus facile de grandir avec le VIH.
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child-friendly HIV treatment
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