Je tiens à m’excuser tout d’abord car je vais faire quelque chose que je ne devrais pas faire. Je vais remettre mon ancien chapeau d’activiste. En tant que directeur exécutif du Medicines Patent Pool (MPP), ce n’est plus vraiment mon rôle. Mais c’est mon histoire et toujours ma passion. Pendant 18 ans, jusqu’à ce que je rejoigne MPP en 2018, j’ai essayé de sensibiliser et de prioriser l’hépatite virale, d’abord au Royaume-Uni, puis dans toute l’Europe, et à partir de 2008, à l’échelle mondiale. L’hépatite a toujours semblé être le parent pauvre des maladies infectieuses, ignorée au profit du VIH, de la tuberculose et du paludisme. Les personnes vivant avec l’hépatite ont été constamment laissées pour compte.

Avec une insistance et une urgence croissantes, j’ai appelé à l’action des gouvernements. Pourtant, à quelques exceptions notables et hautement louables près, les actions ont été si lentes qu’elles sont à peine perceptibles, si tant est qu’il y en ait eu. Et maintenant, avec la publication du Rapport mondial sur l’hépatite de l’OMS 2024, nous constatons les conséquences. La mortalité due aux Hépatites est de 1,3 million par an et augmente. Elle sera bientôt la maladie infectieuse la plus mortelle. Cela signifie que nous sommes complètement hors de la cible pour atteindre l’objectif de moins de 500 000 décès par an d‘ici 2030.

C’est une tragédie car nous disposons des outils sous la forme d’un excellent vaccin pour l’hépatite B et de traitements merveilleux pour l’hépatite B et C, et ils sont parfaitement abordables.

En reprenant le rôle de directeur du MPP, nous avons des licences pour des médicaments clés contre l’hépatite C et avions une licence pour le ténofovir pour l’hépatite B (il est maintenant hors brevet, donc une licence n’est pas nécessaire), mais l‘utilisation a été incroyablement faible. Il faut cependant dire que de nombreux pays paient bien plus que les prix les plus bas disponibles. Cela n’a aucun sens, et j’implore les gouvernements de nous contacter pour leur conseiller comment obtenir les prix les plus bas.

Comme le rapporte le rapport de l’OMS 2024, l’une des principales raisons de la faible utilisation des traitements et due aux manque de diagnostic. Le diagnostic de l’hépatite C s’est amélioré pour atteindre 36% contre 20% en 2015, qui était la base de référence du premier rapport de l’OMS en 2017, mais c’est encore bien en deçà de l’objectif de 90% fixé pour 2030. Pour l’hépatite B, la situation est alarmante. Seuls 13% des 254 millions de personnes vivant avec l’hépatite B ont été diagnostiquées, une augmentation complètement insignifiante par rapport à la base de 9% en 2015. Si vous n’êtes pas diagnostiqué, vous ne pouvez pas accéder au traitement et donc prévenir la cirrhose et/ou le cancer du foie qui sont à l’origine de l’augmentation du nombre de décès.

Comment pouvons-nous continuer à laisser cela se produire ? Nous avons les outils. Nous ne les utilisons tout simplement pas. C’est comme rester au bord d’une rivière en crue en regardant quelqu’un se noyer. Au lieu de leur lancer la bouée de sauvetage que nous tenons dans nos mains, nous nous contentons de leur faire signe de la main.

La triste vérité est que la cause sous-jacente de l’inaction est un manque profond de volonté politique dans de nombreux pays. Même là ou il existe des plans nationaux, ils ne sont pas mis en œuvre. Nous sommes en 2024. L‘année 2030 approche à grands pas. Nous devons agir MAINTENANT – dans l’année qui vient – pour avoir un espoir de revenir sur la bonne voie et  atteindre les objectifs mondiaux convenus. Il n’est pas trop tard maintenant, mais très bientôt il le sera. J’implore les pays de prendre note.

Charles Gore

Travail du MPP dans l’hépatite

Le MPP a joué un rôle important dans l’élargissement de l’accès aux traitements contre l’hépatite. Les traitements DAC et les combinaisons de DAC pour le traitement de l’hépatite C ont été fournis dans 46 pays, avec un total de 1,6 million de traitements distribués. Notre licence pour le DAC couvre 112 pays, mais seulement 46 ont bénéficié de ces traitements jusqu’à présent. Le TAF (25mg) utilisé dans le traitement de l’hépatite B a été fourni dans 17 pays. Voir les pages 33 et 34 de notre dernier Rapport Annuel 2023 pour plus de détails.