Intervention du Medicines Patent Pool lors de la réunion « COVID-19 et équité vaccinale : quelle contribution peut apporter l’OMC ? »
19 avril 2021
Lors de la réunion de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) tenue le 14 avril 2021, Charles Gore, directeur exécutif du Medicines Patent Pool (MPP), a prononcé la déclaration suivante :
14 avril 2021
Intervenant : Charles Gore
Depuis le début de cette pandémie, nous voyons les mêmes difficultés survenir pour chaque nouvelle technologie de santé (d’abord les équipements de protection individuelle, puis les tests de dépistage et, enfin, les vaccins). Dès que l’efficacité d’une technologie est démontrée, la demande augmente fortement, l’offre ne parvient pas à satisfaire cette demande, des problèmes d’équité surviennent – les pays à revenu faible et intermédiaire étant souvent les grands perdants – et les pays fabricants font peser des contraintes sur les exportations. Une partie de ces difficultés semblent inévitables. En effet, il est difficile de prédire ce qui fonctionnera ou ce dont on aura besoin. Une fois que l’on sait qu’une technologie fonctionne, on a besoin d’en produire de grandes quantités, presque instantanément.
Il n’y a pas de solution miracle à ce problème. Une technologie, quelle qu’elle soit, ne peut pas être produite du jour au lendemain. Ce n’est pas possible pour les masques, et encore moins pour des vaccins complexes. Cependant, des moyens existent pour essayer d’améliorer la situation. Des efforts importants ont été faits, parmi lesquels la signature d’un nombre inédit d’accords entre entreprises pour tenter d’accroître les capacités de production. Des investissements massifs et risqués ont été réalisés par des entreprises et des États. À plusieurs reprises, le concept de broad licensing (octroi de licences élargi) a été proposé afin d’accroître l’offre, de mettre à profit les capacités de fabrication partout sur la planète et de créer une base de fournisseurs mieux répartie géographiquement.
À maintes reprises, l’importance des licences de santé publique a été soulignée ; j’entends par là les licences élaborées dans le but affiché de contribuer à atteindre les objectifs de santé publique. Les licences de santé publique associées à un transfert de technologies approprié, comme celles proposées par le Medicines Patent Pool depuis 11 ans, ont vocation à trouver le juste – et souvent délicat – équilibre entre les intérêts commerciaux légitimes de ceux qui innovent, la pérennité nécessaire aux bénéficiaires de sous-licences et les besoins critiques de la société en matière de santé publique. Nous parvenons à trouver cet équilibre, car nous sommes une institution de santé publique qui ne recherche pas le profit, mais qui comprend parfaitement les réalités commerciales. Résultat : nos licences répondent bel et bien aux besoins de santé publique.
Je voudrais citer ici certains des principes de base qui guident notre travail. Les licences du MPP doivent :
- être guidées par l’impératif de santé publique consistant à disposer de technologies de santé abordables et de grande qualité ;
- donner la priorité à l’accélération de l’accès, grâce à un accroissement de la capacité de production visant à répondre spécifiquement aux besoins des plus vulnérables, ceux qui autrement sont laissés pour compte ;
- être non-exclusives, facilitant ainsi la réduction des prix grâce à la concurrence et mettant à profit une vaste base de fournisseurs répartis partout sur le globe pour garantir la sécurité de l’approvisionnement et une production locale ;
- être transparentes, car c’est essentiel pour la confiance ;
- être souples, pour pouvoir s’adapter à des besoins et à des circonstances spécifiques ;
- s’ajouter à d’autres approches en matière d’accès et les compléter ;
- être volontaires et obtenir l’engagement de toutes les parties.
Cette approche est actuellement mise en œuvre et a prouvé son efficacité pour la santé publique, puisqu’elle a permis de fournir plus de 18 milliards de médicaments dans plus de 140 pays. Je terminerai en disant que, au Medicines Patent Pool, nous sommes persuadés que notre modèle de licences de santé publique peut faire partie de la solution, et nous continuerons à mettre notre savoir-faire à la disposition de la communauté internationale.